Hans-Rudolf Merz en dit trop... par erreur
Hans-Rudolf Merz s'est trop emballé hier devant un parterre d'étudiants d'Uni Mail, à Genève, venus assister à un cours exceptionnel donné par le président de la Confédération.
Suisse de la liste grise du G20
Fabian Muhieddine - le 05 mai 2009, 22h33Le Matin
Un projet pour en finir avec la liste grise du G20. C'est ce que le Conseil fédéral présentera ce matin, juste après sa séance hebdomadaire.
C'est en tout cas ce que Hans-Rudolf Merz a lâché hier devant un parterre d'étudiants d'Uni Mail, à Genève, venus assister à un cours exceptionnel donné par le président de la Confédération sur le droit fiscal. Le ministre des Finances répondait à l'invitation du professeur et avocat fiscaliste genevois Xavier Oberson, qui est également membre du groupe d'experts nommé par la Confédération pour trouver une issue à la crise du secret bancaire.
Une vraie bombe! Hans-Rudolf Merz a dévoilé hier une partie de son plan secret: «Le Conseil fédéral présentera demain (ndlr: aujourd'hui) un projet de négociations avec une douzaine de pays avec qui la Suisse pourrait signer rapidement un accord de double imposition. Elle respecterait ainsi, d'ici à la fin de l'année, les critères du G20 et de l'OCDE et ne serait plus inscrite sur la liste grise.»
Hans-Rudolf Merz s'est refusé à donner la liste des pays concernés. Il devrait rester tout aussi discret sur le sujet aujourd'hui, secret des négociations oblige. Mais ces pays seront probablement à chercher parmi les 14 Etats qui ont déjà fait une demande officielle de négociations à la Suisse...
Conquis par son humourDans la lancée, Xavier Oberson a cité un exemple: «Certains pays ont signé un accord avec le Danemark, or, en l'élargissant ensuite aux juridictions de ce pays nordique, cela fait huit accords d'un coup.» Détail croustillant: la Suisse est déjà en discussions avec ce pays.
Jusqu'à présent, la seule stratégie du Conseil fédéral consistait à expliquer aux autres pays que la Suisse, par son système démocratique, ne pouvait pas signer ces accords d'ici à la prochaine réunion du G20 en septembre prochain. Et ce même si des négociations sont déjà ouvertes avec trois pays: les Etats-Unis, la Pologne et le Japon.
Hans-Rudolf Merz a-t-il donc totalement changé de stratégie? Pas vraiment. En fait, il a surtout l'air de s'être trop emballé et d'en avoir trop dit devant ces étudiants entièrement conquis par son humour... Selon nos informations, il devrait rester beaucoup plus modéré dans son annonce aujourd'hui. Il ne parlera que du début des négociations. Oubliée donc, la liste grise. C'est que le chemin est encore long jusqu'à ce que son plan secret aboutisse...
«Le plan est bon, confirme Philippe Kenel, avocat fiscaliste lausannois, mais il sera très difficile à appliquer.» La menace d'un référendum pèse effectivement toujours sur le premier accord que la Suisse pourrait signer. Ce qui retarderait les plans de Hans-Rudolf Merz de plusieurs mois. Ensuite, l'Union européenne entend signer un accord global avec la Suisse, ce qui impliquerait cette fois de longues négociations mais priverait surtout la Confédération de plusieurs pays européens «simples» à signer.
Que signifie la liste blanche?
Ce que la suisse gagnerait
Redorer son blason L'image de la Suisse a évidemment été écornée par l'inscription sur liste grise, elle serait à nouveau blanchie.
Eviter les sanctions Lors de la prochaine séance du G20, les pays membres devraient décider de sanctions à l'encontre des pays jugés comme non coopératifs en matière fiscale.
Ce que la suisse a dû céder
Adoucir son secret bancaire Pour se retrouver sur la liste blanche, la Suisse devra signer douze accords qui prévoient l'échange d'informations bancaires sur demande avec les pays cosignataires aussi bien en cas de fraude que d'évasion fiscale. Aujourd'hui, la Suisse ne rentre en matière qu'en cas de fraude.
Rappel des faits
18 février 2009 L'Autorité de surveillance des marchés financiers permet à UBS de remettre aux Américains des données bancaires de clients suspectés d'avoir trompé le fisc. Cette décision évite à UBS une poursuite pénale mais écorne le sacro-saint secret bancaire.
13 mars 2009 Le Conseil fédéral accepte de réformer le secret bancaire. Désormais, l'échange d'informations sera accordé aux autres pays sur demande selon les critères de l'OCDE. Mais le droit suisse ne changera pas. Cette clause sera ajoutée dans les accords de double imposition. La Suisse doit donc renégocier les 71 traités qu'elle a déjà signés.
2 avril 2009 Le G20 inscrit la Suisse sur la liste grise des pays non coopératifs en matière fiscale. Pour figurer sur la liste blanche, un pays doit avoir au moins douze accords respectant les critères de l'OCDE. La Suisse n'en a, pour l'instant, aucun. Elle a jusqu'à la réunion du G20 en septembre pour y remédier.
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