Thursday, June 18, 2009

PWC: "Touche pas à mon paradis!" Par Didier REMER

PWC, le grand cabinet de consulting émérite souhaite remettre l'église au milieu du village Luxembourg... Il faut dire que le cabinet présent à Luxembourg tire une grande partie de son chiffre d'affaires en prodiguant informations et précieux conseils au secteur financier de la place. "Le cabinet met un point d'honneur à communiquer sur le virage éthique indispensable que doit poursuivre la place de Luxembourg, il démontre par des études comparatives à quel point les directives de l'OCDE sont relativement "contournables" ou ajustables dans les pratiques, "chaque état est le paradis fiscal d'un autre", croire que la place luxembourgeoise qui vient de perdre plus d'un milliard d'actifs en placements allait se faire "manger" par le reste de la planète était un doux rêve... Un état qui tient son économie avec sa place dans de telles proportions se devait de réagir! Il y a la réalité et cet ensemble d'informations erronées qui circulent comme autant de mauvaises carricatures si propices en période de crise. Luxembourg peut être considéré comme un réel précurseur sur la transparence,bien que trés partagé entre le besoin de préserver le secret bancaire souvent assimilé dans le pays comme le secret médical... Luxembourg qui peut se consoler en comptant le nombres de banques et sociétés françaises et allemandes représentées sur son territoire... PWC fait un effort de pédagogie en cette période trouble, Luxembourg a des atouts, croire qu'il veut se plier à un diktat du couple franco-allemand (ndlr:par exemple) sans tenter de faire valoir son bon droit serait illusoire!" Précise un expert de la place sous couvert de l'anonymat. Dans un récent article publié dans un quotidien Luxembourgeois qui reprend une étude du cabinet, un collège d'experts associés du cabinet n'hésite pas à montrer les limites de l'OCDE dans sa course à la régulation souhaitée par le G20. Une lecture bien confortable de l'histoire qui se joue, avec en ligne de mire le besoin de conserver sa clientèle... Qui pourrait en faire le procès à PWC? Cet article a le mérite de remettre l'église au milieu du "village Luxembourg". L'OCDE ne fera pas la même lecture, mais ne manque pas de souligner les efforts notables d'un état qui dirigeait une importante fronde contre ses recommandations et donc listes depuis les salons feutrés d'un premier ministre, Jean-Claude Juncker adepte d'un grand écart permanent entre fonction de chef de l'Eurogroupe et membre des pays listés en gris (foncé) de l'OCDE justement... Président de l'Eurogroupe qui organisait un mini sommet à Luxembourg pour développer activement la contre-offensive, succès relatif que la Suisse mesure à juste titre depuis qu'elle peine à se mettre en conformité dans un rythme aussi efficace que Luxembourg. L'affaire Madoff et quelques autres dossiers brûlants plus tard, la place "se range" derrière les prescriptions de l'OCDE qui annoncent que le prochain opus du prochain G20 à Pittsburgh aux Etats-Unis, sera bien celui du volet sanctions et donc du bilan des "bonnes volontés". Plusieurs initiatives sont à mettre au compteur du Luxembourg, la signature des conventions type OCDE et la création dans le cadre d'une opération de communication gouvernementale, de l'organisme LIGFI (http://www.ligfi.org/) qui se veut une vitrine du virage éthique de la place. Le plus gros étant bien sûr et incontestablement le travail constant du premier ministre Juncker qui souhaite que sa place ne se réduise pas en "peau de chagrin" et de refuser de voir les actifs s'évaporer ailleurs, en dehors de l'Union Européenne par exemple! La place est éfficiente et doit se conformer, tel est en substance le message du premier ministre qui considère que rien n'est perdu, à perdre, et l'histoire lui donne dèjà raison. Il est clair qu'il faudra concevoir un autre modèle économique pour le Luxembourg qui est touché par cette crise comme tous ses voisins, même s'il conserve une capacité de rebond plus confortable, ce confort n'est pas de nature à s'autoriser des faiblesses dans l'anticipation macro-économique... "Le pays est confronté à deux crises, la crise financière internationale du fait fait de la position dominante de la place financière en Europe et une crise sociale qui s'installe durablement avec par exemple, Arcelor qui annonce de mauvais jours au pays..." Souligne un expert en investissements de la place en concluant: " Ce n'est pas mentir que de dire que Luxembourg est dans une situation plus grave que la crise des années 80, liée au secteur de la metalurgie, à cette époque l'actuel premier ministre était jeune ministre de l'emploi (ndlr:28 ans) et donc connaît l'importance d'une telle crise sociale. Ce n'est pas rien si Jean-Claude Juncker martelle au niveau européen l'impact possible de la crise sociale qui s'installe en Europe!" Pour PWC, pragmatisme oblige, le travail porte sur l'expertise de l'accompagnement, voici donc l'article du cabinet qui remet l'église au milieu du village Luxembourg:




Michel Guilluy, Associé, Vincent Marquis, Manager, Marion Jenny, Advisor, PricewaterhouseCoopers Luxembourg., d’Lëtzebuerger Land, 22 mai 2009
« Nous en savons plus sur le mouvement de la terre autour du soleil, et du soleil autour de l’univers, que sur les cycles industriels et les raisons de la crise », ainsi constatait non sans un certain défaitisme le Manchester Guardian en…1931 ! Il semblerait qu’en 2009 la situation ait quelque peu évolué. En effet, les raisons invoquées par certaines personnalités politiques pour expliquer la naissance de la nouvelle crise sont là ; affirmées avec assurance et conviction, répétées à qui veut encore bien l’entendre, qu’aucun discours contradictoire ne saurait ébranler. Secret bancaire, paradis fiscaux, origine de tous les maux ! Seulement voilà, le Luxembourg, ainsi que d’autres pays, semblent depuis quelques temps déjà, être ouvertement pris à partie, affublés de noms
et d’adjectifs pour le moins provocateurs : « paradis bancaire », « Etat magicien de la fiscalité », « trou noir du système financier mondial », « Etat blanchisseur d’argent »... Autant de termes employés indistinctement, appartenant pour certains à un même champ lexical, celui de l’escroquerie et de la malhonnêteté, plaçant par là même le Luxembourg sur le banc des accusés. « Le Luxembourg, victime d’un mauvais procès »Le Luxembourg, largement mis en cause dans l’offensive contre les paradis fiscaux, n’est pas un Etat voyou. D’aucuns estiment que le pays est victime d’un mauvais procès et expriment leur incompréhension face au lien établi entre crise financière et secret bancaire. Une partie de la classe politique étrangère semble en effet s’être focalisée au cours de ces derniers mois sur le secret bancaire, lequel constituerait la pierre angulaire de toute évasion fiscale. L’amalgame fait entre paradis fiscal et secret bancaire existe malheureusement toujours à l’étranger. Ainsi, une chaîne de télévision française, suivie quelques mois plus tard par une chaîne de télévision allemande ont ouvertement présenté lors de deux reportages distincts, le Luxembourg comme un paradis fiscal sur base du secret bancaire existant. Dès lors, comment ne pas céder à la facilité des amalgames que la confusion générale et certaines déclarations publiques, bien souvent proférées par les plus haut-placés, contribuent à créer, voire à encourager ? Quel crédit donner à des raisonnements en apparence valides pour une grande partie de l’opinion publique et pourtant inacceptables ? Par l’usage de méthodes et d’arguments douteux, les Sophistes des temps modernes créent bel et bien le doute et l’égarement.« Un Etat ne serait-il pas finalement toujours le paradis fiscal d’un autre ? »Il convient peut être à ce stade de rappeler brièvement que le concept de « paradis fiscal », tel que défini par les critères de l’OCDE, renvoie à quatre critères principaux : absence d’imposition - ou imposition insignifiante -, absence d’un véritable échange de renseignements, absence d’activités substantielles et enfin absence de transparence.Ces critères, qui restent toutefois relatifs en l’absence de définition du concept de paradis fiscal dans les législations des pays membres de l’OCDE, ne prennent réellement tout leurs sens qu’en comparaison avec d’autres pays à fiscalité plus élevée. Notons d’emblée que le Luxembourg, avec un taux d’imposition sur le bénéfice des sociétés de 28,59% (29,63% jusqu’à l’année dernière), est dans la moyenne des autres pays. Le taux moyen devrait en effet s’établir autour de 25,5% en 2009 dans l’ensemble des pays de l’OCDE contre 21,13% dans les seuls pays de l’Union Européenne. Par ailleurs, un rapport de l’OCDE de 1987 précisait dès son introduction « qu’il n’existe pas de critère unique, clair et objectif permettant d’identifier un pays comme étant un paradis fiscal ». Il ne s’agit ainsi que d’un renvoi à des critères sans jamais élever celui de l’absence d’un véritable échange de renseignements au rang d’un critère exclusif, suffisant à qualifier un Etat de paradis fiscal. Mieux, un autre rapport de 1998 mettait en avant le caractère nécessaire de l’absence d’imposition - ou imposition insignifiante – comme préalable à l’identification d’un paradis fiscal. Ce constat appelle donc à la prudence face à la tentation de porter des jugements catégoriques, sinon hâtifs, dont les conséquences pourraient s’avérer – ou s’avèrent déjà – fâcheuses sur le plan diplomatique. On l’aura d’ailleurs remarqué, une tension palpable règne depuis quelques temps déjà au sein de la classe politique internationale. Considérant le manque de clarté et d’objectivité dans l’appréciation de ces critères, la France ne pourrait-elle pas, avec près de 500 niches fiscales à son actif (zones franches urbaines, investissements dans les DOM-TOM etc.), être taxée de paradis fiscal par un Etat « concurrent » ? L’absence de taxation sur les plus-values boursières par l’Etat Belge serait-elle suffisante à le caractériser de paradis fiscal ? Face à ce concept à géométrie variable, un Etat ne serait-il pas finalement toujours le paradis fiscal d’un autre ?« La problématique de l’évasion fiscale serait sans doute biaisée si elle devait se limiter à la seule question du secret bancaire »Qu’on le veuille ou non - l’OCDE et le sommet du G20 l’ont d’ailleurs confirmé - un Etat ne saurait être qualifié de « paradis fiscal » par le seul fait que sa législation prévoit un secret bancaire. Il s’agirait là d’un raccourci dénué de discernement. Le secret bancaire n’est en effet pas automatiquement à l’origine d’une concurrence fiscale dommageable. La problématique de l’évasion fiscale serait sans doute biaisée si elle devait se limiter à la seule question du secret bancaire. Notons à ce sujet que le secret bancaire, loin d’être absolu, supporte un certain nombre de dérogations, en cas notamment d’escroquerie fiscale. Au vu des récentes déclarations du gouvernement Luxembourgeois, il semble d’ores et déjà permis d’avancer l’hypothèse d’un élargissement de la dérogation à la notion plus large de fraude fiscale dans le cadre d’une mise en œuvre certes assouplie mais stricte, c’est-à-dire limitée à un échange d’informations sur demande dans des cas spécifiques et sur base de preuves concrètes de fraude fiscale. De plus, les autorités luxembourgeoises ont réaffirmé leur volonté – et ce, à nouveau après le G20 de Londres – d’assouplir la législation sur le secret bancaire et de conclure des traités d’échange de renseignements fiscaux sur base notamment de l’article 26, comme complété par le modèle OCDE 2005. La conclusion de douze de ces accords permettra au Luxembourg de quitter la liste « grise » dans laquelle les autorités du G20 l’ont placé. Ceci ne doit pas impacter la période de transition prévue par la directive sur la fiscalité de l’épargne, laquelle continue bel et bien à courir tant que la Communauté européenne n’aura pas conclu d’accord avec une série de pays tiers, incluant notamment la Suisse, prévoyant l’échange d’information sur demande, tel que défini dans le modèle de convention de l’OCDE sur l’échange de renseignements en matière fiscale publiée le 18 avril 2002. Toute confusion entre les deux conventions modèles de l’OCDE est en effet à éviter. Pour rappel, pendant cette période de transition, le Luxembourg est autorisé à ne pas appliquer l’échange automatique d’informations, mais doit alors prélever une retenue à la source sur certains paiements d’intérêts à des non-résidents.« La compétitivité fiscale n’est pas un concept condamnable en soi, pas plus que ne l’est le concept d’ingénierie financière »Par ailleurs, si le diagnostic posé par certains politiques étrangers est le suivant : secret bancaire = paradis fiscal = crise financière, le remède ne semble de toute évidence pas adapté. Se cantonner à publier une série de listes, dégradé de couleurs oscillant entre le noir, le blanc et le gris, focalisées sur le seul critère de l’échange de renseignements, apparait en effet davantage comme un effet d’annonce politique peu convainquant que comme une réponse réellement satisfaisante. Nul ne doute que le temps saura nous le démontrer. Considérer qu’il s’agit là de listes parfaites et exhaustives et leur accorder par là-même tout le crédit souhaité, serait oublier que certains pourfendeurs des paradis fiscaux, ceux-là même les ayant élaborées, ne sont pas totalement irréprochables si l’on considère l’indulgente position de la Grande-Bretagne face aux îles anglo-normandes, celle des Etats-Unis face à l’Etat du Delaware et des Îles Vierges américaines ou même celle de la France face à Monaco et Andorre. Il est dès lors permis de douter de leur sincérité et difficile de croire en l’existence d’une réelle volonté politique de combattre - tous - les paradis fiscaux.La lutte contre le secret bancaire semble n’être finalement qu’un prétexte. L’objectif de cette croisade étant de créer un climat de tension propice à ce réflexe protectionniste d’un autre temps. Il porte aussi atteinte aux Etats disposant d’un environnement économique favorable, soutenu par une fiscalité raisonnable, dont l’attractivité dérange, agace, crée l’envie. S’attaquer au secret bancaire, c’est aussi condamner la liberté de chaque Etat d’exercer de manière souveraine mais encadrée, une compétence qui lui est propre. Une partie du débat se trouve peut-être là. La marge de manœuvre dont dispose un Etat en matière de fiscalité est certes encadrée par des dispositions d’ordre communautaire et international, mais à l’instar du Luxembourg, il reste encore possible de se positionner avantageusement sur la scène internationale dans le respect des limites posées. Il serait de bon ton de rappeler à certains que la compétitivité fiscale n’est pas un concept condamnable en soi, pas plus que ne l’est le concept d’« ingénierie financière » dans le respect des limites posées par la Cour de justice des Communautés européennes, et notamment par l’arrêt Cadbury Schweppes le 12 septembre 2006. Rappelons que la Cour a, par cet arrêt, réaffirmé la légitimité de la prise en compte de paramètres fiscaux dans l’usage fait par un agent économique d’une des libertés fondamentales, dès lors que ce type de comportement ne consiste pas en la création de « montages purement artificiels, dépourvus de réalité économique ». Dans ces conditions, une utilisation efficace des libertés de circulation justifiée par une stratégie fiscale est donc parfaitement autorisée et ne devrait dès lors pas souffrir de critiques si virulentes. Le débat actuel semble donc malheureusement prendre une orientation erronée en se focalisant autour du seul secret bancaire. La lutte contre l’évasion fiscale implique en effet de s’intéresser également, voire essentiellement, aux structures abusives n’ayant d’autres raisons que celle d’éluder l’impôt. Il s’agirait en d’autres termes de s’intéresser de plus près au problème des «montages purement artificiels». « Le Luxembourg a vraisemblablement les armes suffisantes pour remédier au problème des pratiques financières abusives »Pour combattre efficacement l’évasion fiscale et son impact sur le budget de l’Etat dans une période de crise économique, le débat actuel devrait s’orienter davantage vers la problématique des pratiques abusives, et des moyens pour y remédier tel que le développement d’une ingénierie fiscale adaptée et respectueuse des limites posées. Avec les outils réglementaires dont il dispose, son cadre législatif évolutif et attractif et ses nombreux spécialistes, le Luxembourg a vraisemblablement les armes suffisantes pour proposer des solutions adaptées au besoin des agents économiques. Son arsenal législatif et réglementaire précis en matière de lutte contre le blanchiment d’argent en fait sans conteste un Etat précurseur, bien armé et conscient de la nécessité d’entretenir une approche proactive au sein d’une place transactionnelle importante. Malgré les effets dramatiques qu’entraine la « crise », celle-ci devrait au moins permettre une prise de conscience générale de l’existence de pratiques condamnables et de la nécessité d’une plus grande transparence pour y remédier. Le Luxembourg réduit en apparence son attractivité en adaptant les contours de son secret bancaire, la sphère privée étant une composante importante dans le cadre de relations d’affaires, mais gagnera sans mal, par l’existence d’un environnement stable et spécialisé, à restaurer une confiance injustement altérée.


Sources: D' LESTESBUERG LAND © Copyright 2009
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